Héroïne : Sens 1 : Femme qui fait preuve d’un grand courage
Sens 2 : Femme qui tient le rôle principal dans une histoire
Dictionnaire Larousse
» La joueuse de Saz » Wontner ( 1857-1930)
N’est-il pas saisissant ce portrait de femme ? J’y vois une femme déterminée à jouer sa propre musique. Elle est belle, un peu mystérieuse, évanescente, présente. Les oeuvres des artistes agissent souvent comme des miroirs. On y plonge sans trop comprendre pourquoi et quelque chose s’allume en vous. C’est le vrai pouvoir de l’art. Une oeuvre n’a pas besoin d’être expliquée. Elle résonne en vous ou elle vous laisse indifférent. Ce qui compte ce n’est pas ce qu’on en pense ou ce qu’on devrait en penser mais ce que ça nous fait.
Notre sensibilité devrait être notre seule boussole, car elle est toujours vraie pour nous.
Quand je pense aux héroïnes de l’Histoire, je pense immédiatement à Jeanne d’Arc. Ne me demandez pas pourquoi. Peut-être parce que j’admire cette femme forte qui a réussi à mener une armée, pour libérer la France, sur la base d’une vision. Malheureusement, elle a terminé son existence au milieu des flammes d’un sinistre bûcher. Pas très positif tout ça.
Une héroïne ? A qui pensez-vous en premier ? Moi, je pense aussi à Simone de Beauvoir, parce qu’elle a osé briser des tabous à une époque où les femmes n’étaient pas libres d’être juste l’égale des hommes, et puis je pense aussi à Lucie Aubrac, résistante pendant la seconde guerre mondiale, elle s’est engagée pour la paix et a fermement milité contre l’utilisation de l’arme atomique. Il y en a tant d’autres. Combien sont-elles à continuer à vivre au sein de notre inconscient collectif ?
Il y a ces héroïnes du passé, inspirantes, fragiles et déterminées, courageuses : elles sont la somme de la beauté et de la force des femmes à travers les âges. Et puis, il y a les héroïnes du présent, qui n’apparaîtront jamais dans les livres d’Histoire, ces femmes dont on ne parle pas et qui pourtant portent le monde avec leur joie, leur courage et leur amour de la vie. Vous en connaissez au moins une autour de vous. C’est peut-être votre mère, votre voisine, votre grand-mère, une amie ou peut-être juste vous.
» Les trois âges de la femme » Klimt
J’ai la chance d’en connaître quelques-unes autour de moi. Laissez-moi vous parlez d’elles.
Il y a Larissa, d’abord. Je l’ai rencontré devant l’école où nos filles respectives sont scolarisées. Larissa a fui la Tchétchénie avec sa petite, il y a quelques années. Elle parle un français hésitant. Je ne comprends pas toujours ce qu’elle me dit, mais elle est très expressive, alors on s’en sort. Nous rions souvent. Cette femme est un soleil. Toujours le sourire. Et pourtant sa vie a été dure. Elle a connu la guerre. Un jour, elle m’a raconté, avec des mots hésitants, son histoire. Je ne comprenais pas un mot, tant son français était submergé par les larmes qu’elle ne s’étaient jamais autorisée à verser. Elle s’est mise alors a dessiner sur une feuille blanche qui traînait sur la table de mon salon : les chars, l’école bombardée, en pleurant, elle me raconte qu’elle a vu mourir des enfants. C’est ce qui l’a poussé à partir, à prendre le risque de l’exil, sans papiers, elle est arrivée en France dans l’espoir d’offrir à sa fille, une vie meilleure. Elle se bat avec une force qui me laisse souvent sans -voix.
Je me souviens de ce jour où paniquée elle m’a demandé de garder sa fille, car elle devait se rendre quelque part en urgence. Je n’ai pas tout compris mais j’ai accepté tout de suite. Pour me remercier, elle a sonné chez moi avec un sac rempli de ces victuailles qu’elle reçoit régulièrement du Secours Catholique. Larissa vit dans un hôtel, dans une chambre avec sa fille en attendant que sa demande de régularisation soit examinée. Elle vit avec très peu d’aides. Et là voilà qui vient m’offrir le peu de choses dont elle dispose.
Parfois elle n’a pas le moral, elle pleure, proche du désespoir, je me contente de l’écouter, et puis elle retrouve l’énergie, elle essuie ses larmes et elle rit, en disant « S’il vous plait Dieu » en levant les yeux au ciel, et puis on éclate de rire, car elle me fait penser au mime Marceau, elle ne comprend pas et on rigole quand même, parce que quand la vie est dure et triste il n’y a que les larmes ou les rires qui libèrent le coeur de cette insupportable détresse.
Il y a Larissa, mais il y a aussi toutes ces femmes qui élèvent leurs enfants seules, abandonnées par des maris infidèles, et qui gardent la tête haute, offrent leur aide, partagent leurs repas, avec les voisines, se préoccupent du petit vieux du quartier.
Je les vois, je les observe. Je discute de temps en temps avec elles, au parc, à la boulangerie. J’aime les écouter. Je suis comme ça.
Ce sont des femmes simples, qui ont eu leur lot d’épreuves, de souffrances, de désillusions, mais qui sont toujours debout. Ce ne sont pas forcément des guerrières, bien sûr elles pleurent, elles sont angoissées, elles subissent l’injustice, mais elles ont en elles, cette lumière, cette force de vie qui fait que de leurs larmes naissent des oasis, où l’on vient se ressourcer avec bonheur. Elles donnent avec leur âme, elles donnent avec leur coeur. Leur sacrifice a fait grandir des enfants conscients de la valeur des choses.
Ce sont des femmes entourées d’amour. Il y a toujours quelqu’un pour leur rendre visite toujours quelqu’un pour les dépanner. Le sacrifice. La souffrance. Combien de femmes connaissent le vrai sens de ces deux mots ? Nos mères et nos grands-mères nous ont transmis leurs douleurs intimes au creux de tous les non-dits de nos alcôves féminines, mais elles nous ont également transmis la force et le courage, la joie et le sens du partage.
Aujourd’hui plus que jamais, c’est aux femmes d’aujourd’hui de leur rendre hommage, en étant totalement et complètement elles-mêmes. C’est la prochaine étape de l’histoire des Femmes. Incarner la femme libre, la créative, la mystérieuse, la mère, la guérisseuse, la visionnaire, l’amoureuse. Tous ces archétypes du féminin qui nous composent et nous montrent la voie. C’est à nous aujourd’hui de choisir la femme que nous voulons être.
Un mouvement est en marche. Il ne s’arrêtera pas. J’ai une amie chorégraphe Iaro qui va travailler cette année sur » Les héroïnes du présent« , une création chorégraphique ouverte à toutes et qui démarre en octobre à Paris, et que je vous invite à découvrir : http://www.bare-dance.com/. C’est un très beau projet, qui va revisiter les figures mythiques du féminin pour en extraire l’essence à travers la danse.
J’ai une autre amie, Hélène, qui a l’intention de créer « L’encyclopédie des femmes « , des capsules destinées aux entreprises pour ouvrir les esprits sur la thématique de l’égalité Hommes-Femmes.
Regardez autour de vous. Les femmes s’investissent chacune à son niveau. Et c’est très beau à observer. Ce renouveau.
« Le baiser «
Constantin Brancusi
( 1876- 1957 )
Et nous les Hommes me direz-vous chers lecteurs ? Ne voyez pas dans ces lignes, un pugilat féministe. Le féminin n’est pas le féminisme. La guerre est finie. L’heure est à la réconciliation. On ne veut plus prendre votre place, mais trouver notre place à vos côtés, afin de marcher ensemble dans la même direction.
En aimant les femmes pour elles-mêmes, en vous laissant toucher, en acceptant votre propre sensibilité et en exprimant vos émotions, vous deviendrez plus fort, plus complet. Quand à nous les Femmes en devenant plus autonomes, en nous réalisant dans le monde, en libérant notre créativité, nous deviendrons nous aussi plus complètes, plus unifiées. L’animus et l’anima, théorisés par Carl Jung, enfin réconciliés.
En acceptant chacun en nous-même nos forces masculines Et féminines, nous pourrons faire alliance et nous engager non plus dans un combat mais dans la coopération, dans le partage, dans la créativité.
Imaginez ce que serait le monde, si nous étions tous les héros et les héroïnes de nos existences. Si nous écrivions les scénarios de nos vies non plus en répétant les schémas du passé, sur la base de cette incessante lutte entre dominant et dominé, entre victime et bourreau, qu’est-ce qui changerait ?
On serait peut-être un peu plus libres.
La liberté se gagne avec la conscience.
Arrive un moment où il faut choisir. Regarder en soi. Repérer les répétitions inconscientes, les scènes que nous rejouons fidèles à nos ancêtres, puis décider en conscience de lâcher tout ça, et juste d’être soi.
Je rends hommage aux femmes qui se relèvent, aux femmes qui continuent d’aimer malgré les désillusions, aux femmes vulnérables, aux courageuses, qui cherchent la lumière, quand tout autour il fait noir. Ces femmes qui apprennent à devenir des femmes en s’aimant et en aimant les Hommes.
Je rends hommage aux hommes qui pleurent, aux hommes qui reconnaissent leurs erreurs, aux hommes qui regardent à l’intérieur, écoutent leur intuition alors qu’ils se heurtent à des préjugés d’un autre âge, des hommes qui apprennent à devenir des hommes en s’aimant et en aimant les Femmes.
Ne sommes-nous pas avant tout des êtres humains, avant d’être des hommes ou des femmes ?
Puissions-nous chercher à nous comprendre et créer ensemble, un monde meilleur.
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