« On peut fort bien vivre sans âme, il n’y a pas de quoi en faire une histoire, cela arrive très souvent. Le seul problème c’est que les choses ne viennent plus vers vous, quand vous les appelez par leur nom . »
Christian Bobin
J’ai découvert cette toile, il y a quelques jours déjà et je me suis arrêtée un long instant, étonnée d’y trouver une illustration de mon monde intérieur du moment. L’art sert vraiment à cela. A nous renvoyer quelque chose de nous-même de si volatile que même les pensées n’arrivent pas à le fixer. Je contemple donc cette toile et j’y vois la multitude des voix qui se manifestent dans mon esprit au quotidien. Non je ne suis pas schizophrène, je vous rassure, mais il m’arrive d’être l’arbitre impuissante d’un conflit récurrent entre la peur et la confiance. Je travaille à la réconciliation et j’avais envie de partager mon expérience du sujet, car c’est une thématique qui revient souvent, autour de moi et en moi.
Pendant des années, j’ai eu peur. Surtout de l’avenir. J »ai longtemps été une scénariste d’anticipation négative très inspirée. Imaginer le pire, pour se prémunir du pire. Envisager l’échec, avant même qu’il ne se présente. Recevoir un coup de fil et en un instant, voir défiler une série de catastrophes. Se rendre à un entretien ou à un concours et penser, ça ne marchera pas. L’enfer, n’existe pas en dehors de nous. Il est bâti à partir du fertile terreau de nos angoisses.
Quand je m’engageais dans des actions qui me plaisaient à l’issue incertaine, comme le sont par essence, toutes les actions nouvelles, j’entendais aussitôt une voix qui me disait : » Tu n’y arriveras pas. Calme tes ardeurs. Sois raisonnable. On ne fait pas toujours ce qu’on veut dans la vie. Peut-être devrais-tu voir moins grand. Arrête de rêver. C’est pas gagné « . Docile, j’écoutais alors la voix de la peur et cela me conduisait à la paralysie. Surtout ne pas bouger. Surtout faire comme tout le monde. Ne pas rêver trop grand. Eviter la souffrance de la désillusion. Surtout ne rien tenter de nouveau. On ne sait jamais, on pourrait se faire mal, me disait cette voix. On pourrait faire une demande et être rejeté. On pourrait faire confiance à quelqu’un et être trahi. On pourrait aimer et ne pas être aimé en retour. On pourrait se dévoiler et être piétiné. On pourrait surtout se tromper.Et ça ne se fait pas de se tromper. Mieux vaut donc ne rien tenter. C’est plus prudent.
Mais un jour, une autre voix s’est fait entendre. Une voix qui avait la candeur et l’assurance d’une petite fille rieuse, une petite fille à qui personne n’avait encore appris à avoir peur. Cette voix là ne disait pas : » On va réussir, tout ce qu’on va entreprendre « . Elle disait plutôt : » J’aime faire cela, car quand je fais cela, mon coeur bat, je me sens alors légère, inspirée, dynamisée, joyeuse « . En un mot : vivante. Et parce que elle se sentait vivante, alors elle avait naturellement confiance.
Puis j’ai écouté plus attentivement. Encore et encore. Et j’ai compris, que la voix de la peur, n’était pas vraiment la mienne, mais celles de tous les autres, qui ont eu peur avant moi, de tous ceux qui ont eu peur pour moi. Tous ces autres qui ont défilé dans ma vie, parents, amis, instituteurs et même employeurs. Tous ces autres qui au fond avaient peur d’eux-même, de leurs propres erreurs, de leurs propres échecs et qui n’ont cessé de me répéter qu’il fallait faire attention, surtout ne rien tenter de nouveau, surtout ne pas suivre ses rêves. Surtout ne pas croire que la vie est capable de nous offrir le meilleur.
La peur est contagieuse. C’est un virus très puissant. Et bien souvent elle s’est infiltrée en moi, comme un poison. Et chaque goutte de peur a progressivement paralysé tout élan, tout désir de changement.
Mais vivre dans la peur, ce n’est pas vivre. Et l’autre voix a commencé à me le rappeler. Elle avait besoin d’espace pour exister. Je n’écoutais pas toujours et moins j’écoutais, plus une sorte de malaise commençait à s’insinuer en moi. Ce malaise avait la forme d’un grand trou noir. Aucune étoile à l’horizon, rien qu’un immense vide totalement sombre. Et je me disais alors : c’est donc cela vivre ? Serait-ce donc cet absurde voyage guidé par la peur ?
L’autre partie se réveillait à chaque fois qu’une rencontre bienveillante se présentait sur mon chemin, à chaque fois, que je m’émerveillais de la beauté de la nature, à chaque fois, que quelque chose de bon et de positif entrait dans ma vie. Et cette partie là, me disait : » Tu vois, c’est cela la vie, c’est une énergie en mouvement, c’est la fluidité, c’est l’échange, c’est la confiance que tout vient à toi si tu ouvres ton coeur, si tu sais donner mais aussi recevoir, si tu sais demander et accepter l’aide des autres, si tu as foi en toi et en tes aspirations profondes « .
Aujourd’hui la voix de la peur n’a pas disparu. Elle ne disparaîtra jamais. Elle fait partie de moi. Mais je la reconnais. Je l’apprivoise. Je la remercie parfois, car je sais que son intention positive est de me protéger, mais je ne lui donne plus les pleins pouvoirs, en tous cas pas tous les jours. Alors la confiance a commencé à se sentir moins à l’étroit. Alors la confiance s’est installée au creux de mon ventre et au centre de mon coeur. Je pense à ce que je souhaite vivre et obtenir et c’est elle qui m’encourage, c’est elle qui me répète que je mérite le meilleur et que j’ai le droit d’être heureuse comme chaque être humain sur cette terre.
Et alors la magie de la vie a commencé à se manifester. Alors de belles rencontres sont arrivées, juste au bon moment. Alors des opportunités se sont présentées. La confiance est partie devant en éclaireur et m’a montré la voie à suivre.
La voix de la confiance, doit cependant être nourrie d’énergie positive au quotidien, sinon elle redevient vite aphone. Il est donc nécessaire de prendre soin d’elle, en lui offrant des pensées positives, des pensées de gratitude, des pensées de bienveillance. Elle aime bien ça la confiance, ça la renforce, ça la réjouit, ça lui donne du carburant pour nous emmener plus loin. La confiance n’aime pas qu’on se maltraite, qu’on se dénigre, qu’on se contente de peu, qu’on se blâme pour nos erreurs. La confiance a besoin que nous soyons en empathie avec nous-même, que nous apprenions de nos erreurs et que nous ayons des objectifs élevés qui font vibrer notre coeur, car elle sait que rien n’est impossible pour elle.
Plus j’avance, plus j’ai tendance à la croire.
Et vous ? Quelle voix écoutez-vous ?
Sandra C.
©larevolutioninterieure.com