« Nous serions tous transformés si nous avions le courage d’être ce que nous sommes » Marguerite Yourcenar
C’est l’une des mes toiles préférées. Je l’ai intitulée » L’oeil de l’univers « , il s’agit de la dernière oeuvre de ma première exposition » Métamorphose » qui a eu lieu à Montmartre à Paris en septembre dernier. Le bleu est vraiment ma couleur. Elle m’apaise. Elle me relie en un instant à l’infini qui est pour moi un monde ouvert sur une multitude de possibles. Cet oeil grand ouvert perçoit le monde dans sa totalité. L’ombre et la lumière. A l’intérieur comme à l’extérieur, c’est l’équilibre entre ces deux forces qu’il faut trouver pour atteindre la paix.
Qui aurait pu imaginer qu’un jour j’exposerai des toiles à Paris, au coeur du quartier bohème de la capitale ? Sûrement pas moi. Et pourtant, c’est arrivé. Et c’est à cette crise intérieure que je dois ce miracle. Sans elle, je n’aurai jamais accédé à mes aspirations profondes et à mes talents cachés.
Mais reprenons le fil de mon histoire.
Dans le précédent billet, je vous racontais mes larmes et ma douleur. Le changement géographique. La rupture professionnelle. La séparation. L’effondrement de mon monde intérieur. Et la perte de repères qui s’en est suivie.
Mon conjoint depuis 13 ans m’annonce donc qu’il me quitte pour une autre. Je suis dévastée. Je pleure tous les jours. Des torrents de larmes. Pleurer ce n’est pas si grave. Cela fait du bien. Le plus terrible, c’est l’état de mon coeur. Des lambeaux de chaires molles. Voilà à quoi ressemble un coeur ravagé. Impossible dans ces conditions de sentir autre chose que la douleur. J’ai la sensation physique d’avoir un trou béant au milieu de la poitrine. C’est sans doute ce que ressentent les morts-vivants. Vous respirez toujours mais quelque chose est cassé si profondément en vous que même respirer devient éprouvant.
La première chose qui m’a aidée à apaiser la plaie, c’est l’amour des autres. Les amis : cette famille du coeur. Il y a ceux qui compatissent, il y a ceux qui s’inquiètent pour vous et il y a ceux qui vous ouvrent leurs bras sans un mot. Ce sont ces derniers les plus précieux. Ils accueillent sans juger, sans chercher absolument à consoler. Ils offrent leur présence et c’est sans doute le cadeau le plus merveilleux que l’on puisse faire à un autre être humain.
Au début, j’avais honte. Honte de l’échec, honte de ma souffrance. Je me ressentais comme une victime et je n’aimais pas cela. Un jour une amie est venue me voir. Les seules larmes que nous avions versées ensemble jusqu’à ce moment là étaient des larmes de joie. Je suis de nature joyeuse, habituellement la tristesse, quand elle s’invite, je la chasse, mais là je ne pouvais pas. Le performant barrage intérieur que j’avais construit pour éviter de ressentir cette émotion au quotidien n’a bien sûr pas résisté au tremblement de terre qui a secoué mes certitudes. Tout a explosé. Pour mon plus grand bien. Il y a donc cette amie. Ses bras sont doux et chauds. Je sanglote à grande eaux sur son épaule ronde. J’ai honte d’exposer ainsi le visage de ma vulnérabilité. Je lui dis : » Je suis désolée, que tu me vois comme ça « . Elle sourit. Elle me dit alors cette phrase mystérieuse : « Ne t’inquiète pas , tu m’apportes au contraire beaucoup, en cet instant-là ». Je la regarde interloquée. Je ne comprends pas ce que je peux bien lui apporter dans cet état là. Elle poursuit : « Mais oui, en t’abandonnant dans mes bras, tu m’offres ta confiance ! ». C’est sans doute l’une des plus belles phrases qu’il m’a été donné d’entendre dans mon existence. Les mots ont un pouvoir bien plus grand qu’on ne le pense. Ces mots -là ont totalement transformé mon expérience. J’avais donc le droit d’être vulnérable, de craquer, de ne pas être forte tous les jours. Cette prise de conscience a vraiment changé quelque chose en moi. Il y a eu le début d’un sourire, et puis un rire, une explosion de gratitude, et enfin la confiance. La certitude que demain serait un jour meilleur. Le pouvoir de la bienveillance est immense.
Une fois mon amie partie, j’ai continué à rester bienveillante avec moi-même. Ce n’était pas facile tous les jours, car j’avais tendance à me culpabiliser pour ce que je croyais être un échec. Mais dans la vie rien ne se perd, tout se transforme. Et je sais aujourd’hui que c’est la bienveillance que je me suis offerte qui m’a aidée à avancer avec plus de légèreté et plus de joie.
L’autre émotion qui ne me laissait pas de répit, c’était la colère. Je ne savais pas quoi en faire alors elle me dévorait de l’intérieur. J’étais en colère contre moi, contre la situation, contre mon ancien conjoint. Je ne savais pas quoi faire de toute cette énergie destructrice alors je ruminais. Avec application. Jusqu’à en avoir mal au ventre.
Un jour une autre amie me voyant dans cet état -là me dit : » Et si tu peignais ? cela te ferait du bien ! » Je l’ai regardée d’abord avec des yeux ronds, avant de lui répondre : » Mais je ne sais pas peindre ! La dernière fois que j’ai tenu un pinceau c’était au cours de Mr Puel en 3ème et j’ai jamais été une pro du dessin ! » . Elle rigole et me lance : » On s’en fiche, fais comme tu le sens, suis ton mouvement intérieur et lâche-prise ! « . Lâcher-prise ? Je n’avais jamais appris à faire quoique se soit de cette manière là. On nous apprend à tout contrôler pas à lâcher -prise. Mais là, je ne contrôlai plus rien du tout alors j’ai dit : » Pourquoi pas ! ».
Et c’est ainsi qu’a débuté sans que je m’en rende compte le projet » Métamorphose « . Je me suis mise à peindre. Librement. Sans chercher un résultat. En cherchant simplement à vivre une expérience sensorielle avec les matières et les couleurs. Le processus a été pour moi thérapeutique, mais il a été encore plus important que ça. Il a réveillé en moi une vérité profonde : mon besoin vital d’expression.
La créativité m’a aidée à transformer mes émotions. La toile est devenue un cadre sécurisant où j’ai pu m’adonner à un véritable processus alchimique. Chaque tableau renferme sa formule magique. Chaque tableau à sa vibration propre.
Pour autant, je ne me sentais à ce moment là ni peintre, ni artiste. Après tout, je n’avais pas fait les beaux-arts. Qui étais-je pour affirmer que j’étais une artiste ? Et pourtant, tout mon être vibrait à chaque fois que j’étais plongée dans la création. Après les couleurs, il y a eu les mots. Tout au long de ce processus qui a duré près de 7 mois, j’ai écrit de nombreux poèmes. A chaque fois les textes émergeaient en un seul jet. De manière spontanée. C’est devenu ma façon de créer.
La chrysalide a été bénéfique pour moi, car durant cette période, j’ai découvert que la créativité avait le pouvoir de transformer la lourdeur en légèreté. J’ai surtout réalisé à quel point créer était devenu pour moi aussi vital que respirer.
Voilà donc les cadeaux qui dormaient au creux de mon ombre. Si je n’avais pas vécu cette profonde crise de sens je n’aurai jamais exploré cette partie de moi qui ne demandait qu’à exister au grand jour. Ma créativité !
L’éclosion du papillon. Un an jour pour jour, après ma douloureuse rupture amoureuse, je me retrouve » Au petit théâtre du bonheur » à Montmartre. J’y présente ma première exposition de peinture. Je suis émue, heureuse, joyeuse. Les heures sombres me paraissent bien loin. A ce moment précis, je suis moi. Plus que jamais. Comment suis-je arrivée jusqu’à ce lieu au nom si prophétique ? Grâce à une amie. Encore une fois. Si vous ne savez pas où vous allez, laissez les signes vous guider. Il y a toujours une femme sage quelque part qui sera prête à vous aider en partageant son ressenti.
Un jour, cette amie, donc, me montre la vidéo d’un musicien : il s’appelle Estas Tonne.
Je suis subjuguée, par sa virtuosité et sa présence. Mon premier réflexe en rentrant chez moi est de savoir s’il ne serait pas par hasard en concert à Paris. Je découvre alors qu’il a joué Au petit théâtre du bonheur , je me dis qu’il faut absolument que j’aille découvrir ce lieu. Timidement, un jour, je pousse la porte. Dans ce lieu très ouvert, j’ai rencontré des artistes formidables, qui sont devenus des amis. Le fait de baigner dans cette atmosphère de liberté et de partage a stimuler ma créativité et m’a encouragée. J’ y rencontre un artiste -peintre. Il a plus d’expérience que moi mais il suit exactement le même processus de création. Grâce à lui, je prends confiance en moi, en mes ressentis. Il me guide, sans me juger. Et grâce à lui, je progresse mois après mois. Je progresse, car il m’encourage à ne ressembler à personne d’autre qu’ à moi- même . Il ne cesse de me répéter : » Tout doit partir de toi « .
Et c’est ainsi qu’une nouvelle aventure a commencé. Il y a bien d’autres choses dont je pourrais témoigner, j’ai choisi ce volet là aujourd’hui, car il est très important pour moi. C’est une véritable métamorphose. Je ne suis pas devenu quelqu’un d’autre. Je suis devenue un peu plus moi. Ma révolution intérieure m’a conduite à être moi-même chaque jour un peu plus. Sans me préoccuper du regard des autres.
Quand j’étais adolescente, j’ai vibré en lisant « L’alchimiste « de Paolo Coehlo. Il y avait cette phrase que j’ai toujours gardé en mémoire comme un mantra : » Si tu désires vraiment quelque chose, tout l’univers conspire pour réaliser ton désir « .
Mon âme désirait m’aider à créer une vie qui me ressemble. Longtemps, je ne l’ai pas écouté. Il était plus urgent de me conformer à ce qu’on attendait de moi. Il était plus urgent d’être raisonnable et de choisir la sécurité. Surtout pas mes aspirations profondes encore moins mes rêves. Tout était sous contrôle. Cela ne m’a pas empêché de vivre des ruptures que je n’ai pas réussi à éviter. Sûrement, elles étaient nécessaires. La preuve. Je n’aurai jamais suivi tout ce chemin, si je n’avais pas vécu cette traversée de la peur et de la douleur.
Il y a quelques jours, j’ai joué mon premier spectacle de poésie en musique et ça aussi c’est un miracle. Quand je partage mes créations, je me sens totalement alignée. Aller au bout d’un projet créatif, c’est tout un processus. Et quand il naît, c’est une véritable naissance.
Voyez-vous je crois aujourd’hui que la vie est plus intelligente que nous. Quand nous dévions de notre route, elle n’a pas d’autre choix que de nous envoyer des messages forts pour nous réveiller. Nous pouvons nous perdre, pour mieux nous retrouver. Quand nous sommes sur le bon chemin, nous le sentons grâce à cette chaleur vivifiante qui coule à nouveau dans nos veines. C’est l’énergie de la joie.
L’abondance, ce n’est pas forcément un gros compte en banque, mais c’est avant tout la sensation d’être riche. Je me sens riche aujourd’hui à l’intérieur et du coup des portes s’ouvrent chaque jour un peu plus.
Comment réussir à être soi-même ?
26 Août 2014 36 Commentaires
par Sandra C. dans réflexions Tags:comment réussir sa vie ?, créativité, crise des valeurs, crise existentielle, destinée personnel, enfant intérieur, réussite, révolte de l'âme, renouveau, se libérer du regard des autres, trouver sa voie, unité
» Qu’est- ce que la réussite ? Se lit-elle dans le regard des autres ? Ou dans celui que l’on jette sur soi-même ? Ai-je tenu les promesses que je m’étais faites ? L’enfant que j’étais est-il fier de l’adulte qu’il est devenu ? «
Les trois visages de l’être.
J’aime bien cette photo, car elle exprime, ce que je ressens parfois au coeur de mon monde intérieur.
Au sein de notre espace intime, j’ai compris que nous n’étions jamais tout à fait seuls. Il y a qui je suis à droite. Il y a une fille en colère à gauche. Il y a un début de visage prêt à me gronder encore plus à gauche.
Quand je ressens de la colère, de la frustration, je sais que c’est la petite fille blessée qui s’exprime.
Quand je doute de moi, quand je perds confiance, quand je parle négativement de moi-même, c’est le gros bonhomme pas commode qui hausse le ton et qui me juge et me critique à chacun de mes pas.
Mais quand je crée et que j’exprime ce que je ressens, – ce que je me suis autorisée à faire en prenant cette photo par exemple et en la publiant -, je suis juste moi. Un moi dépouillé, transparent, présent à ce qui est là.
Tout le chemin consiste à répondre cette question : qui parle , quand je parle ? L’investigation en vaut la peine. Elle permet d’éclairer d’une lumière nouvelle nos relations. Elle permet de faire des choix différents. Plus nous devenons conscients de nous-même, plus nous gagnons en clarté.
Nous ne sommes pas obligés de faire plaisir à tout le monde. Nous ne sommes pas obligés de gagner l’amour des autres en nous conformant à leurs désirs. C’est cette prise de conscience, qui marque le début d’une véritable révolution intérieure.
Une révolution intérieure, commence toujours par une révolte de l’âme.
C’est une intuition qui émerge un jour et vous dit : tu as le droit d’être toi-même et d’offrir au monde tes talents uniques. Tu en as même le devoir. Tu n’es pas condamné à continuer à faire ce boulot que tu n’aimes pas. Tu n’es pas obligé de supporter la négativité de ta famille. Tu n’es pas obligé de faire semblant d’être quelqu’un d’autre. Tu es parfait tel que tu es. Il n’y a rien à perdre, rien à gagner. Juste apprendre à être toi. Et observer où cela t’amène.
Alors démarre la quête de soi. C’est un beau voyage rempli de surprises. Il suffit d’être attentif aux signes, aux rencontres et de faire confiance à la vie. Et le processus suit son cours naturellement.
En ces temps troublés, où nous traversons de multiples crises : crise économique, crise de sens, crise écologique. Il est temps de revenir à soi, pour savoir ce qui compte vraiment. Revenir à l’essentiel. Découvrir ses propres valeurs et les incarner. Créer sa propre définition du mot : réussir.
Oui, c’est possible. Il suffit juste de faire un pas vers soi. S’écouter. Se nourrir d’énergie positive. Toujours garder confiance. Focaliser notre attention sur ce que nous aimons faire. Accueillir notre vulnérabilité. Attendre que nos rêves nous trouvent. Nous murmurer des mots doux quand nous nous sentons fragiles. Refuser de nous connecter à la violence du monde. Nous retirer dans nos cocons lumineux. Et attendre la métamorphose, car elle arrive toujours.
Sandra C.
©larevolutioninterieure.com